Hyperphagie boulimique : un TCA encore méconnu, mais réel
- Oksana Loustau-Ponté
- 5 juin
- 4 min de lecture
« Je mange pour me calmer. Pour ne plus penser. Pour ne plus sentir. Pour combler un manque ou un vide »

Ces mots traduisent une réalité bien plus fréquente qu’on ne le pense : celle de personnes qui utilisent la nourriture comme une béquille émotionnelle. Ce n’est pas simplement de la gourmandise ni un manque de volonté. C’est un moyen de survivre à un trop-plein intérieur.
Ce comportement, souvent vécu dans la honte et le silence, porte un nom : l’hyperphagie boulimique.
Il s’agit d’un trouble du comportement alimentaire (TCA) encore trop peu connu, malgré sa fréquence.
Derrière les crises de nourriture incontrôlées se cache souvent une souffrance psychique profonde, invisible aux yeux du monde… et parfois même à ceux qui la vivent.
C’est quoi exactement, l’hyperphagie boulimique ?
L’hyperphagie boulimique se manifeste par des épisodes de suralimentation incontrôlée, durant lesquels la personne mange de grandes quantités de nourriture en un temps relativement court.
La différence avec la boulimie classique ? Il n’y a pas de comportements compensatoires (comme les vomissements, le jeûne ou l’exercice excessif). Ce qui peut conduire à une prise de poids importante, voire à une situation d’obésité.
Les personnes concernées décrivent souvent :
une perte de contrôle pendant la crise,
un besoin impérieux de manger, même sans faim,
puis un profond sentiment de culpabilité, de honte, voire de dégoût de soi.
Souvent diagnostiquée à l’âge adulte, l’hyperphagie boulimique touche entre 3 et 5 % de la population, hommes et femmes confondus, avec une légère prédominance féminine selon certaines études. Et pourtant, ce trouble reste encore méconnu.
Quels sont les facteurs qui favorisent ce trouble ?
L’hyperphagie ne survient pas par hasard.
Elle peut être liée à un terrain familial ou à une sensibilité biologique. Mais bien souvent, ce sont des blessures psychologiques, des régimes trop stricts, des événements de vie douloureux ou encore la pression sociale autour du corps qui participent à son installation.
Ce trouble naît rarement d’un simple « manque de volonté » : c’est un mécanisme de protection face à un trop-plein émotionnel.
Et quelles en sont les conséquences ?
Quand l’hyperphagie s’installe, elle peut peser lourd – autant sur le corps que sur le cœur.
Physiquement, les prises alimentaires répétées entraînent souvent une prise de poids, parfois importante. Cela peut favoriser l’apparition de troubles comme le diabète de type 2, l’hypertension, un excès de cholestérol, des douleurs articulaires ou de l’apnée du sommeil.
Mais les effets ne s’arrêtent pas là.
Sur le plan émotionnel, ce trouble abîme peu à peu l’estime de soi. Il laisse place à la honte, à l’anxiété, à un mal-être profond, voire à la dépression.
Et c’est là que le cercle vicieux s’installe : on mange pour calmer un mal-être… qui finit par grandir encore.
Pourquoi ce trouble reste-t-il si peu reconnu ?
Contrairement à l’anorexie ou à la boulimie, l’hyperphagie est rarement représentée dans les médias ou dans les discours sur les TCA. Elle est souvent confondue avec du simple grignotage ou perçue comme un manque de contrôle.
Et pourtant, l’hyperphagie boulimique est un trouble réel, reconnu par les classifications médicales.
Voici pourquoi il passe souvent inaperçu :
Le poids n’est pas toujours un indicateur fiable : certaines personnes ont un IMC dans la norme.
Les crises se déroulent en secret, dans la solitude, et la honte empêche d’en parler.
La société culpabilise fortement le rapport à la nourriture, renforçant l’isolement.
Beaucoup ne savent tout simplement pas qu’il s’agit d’un trouble légitime, dont on peut se libérer.
Quelles pistes pour s’apaiser (autrement que par la nourriture) ?
La première étape est souvent la plus difficile : reconnaître que quelque chose ne va pas.
Non, ce n’est pas « juste un problème de volonté ».
Oui, ce que vous vivez a un sens, une origine, et mérite d’être entendu, sans jugement.
Voici quelques pistes pour commencer un cheminement vers l’apaisement :
🔹 Observer les déclencheurs : Qu’est-ce qui précède une crise ? Une émotion ? Une pensée ? Une situation ?
🔹 Remettre du lien entre émotions et comportements : Apprendre à reconnaître ce qui se passe en soi avant de compenser par la nourriture.
🔹 Créer des rituels de réconfort non alimentaires : respiration, mouvements doux, écriture, musique, appel à un proche…
🔹 Se faire accompagner : Les thérapies cognitives et comportementales (TCC) proposent des outils concrets pour sortir de ce schéma, à votre rythme. D’autres formes d’accompagnement (psychologique, nutritionnel, médical) peuvent aussi être bénéfiques.
En conclusion
L’hyperphagie boulimique est un appel au secours du corps et du cœur. C’est une stratégie de survie. Mais elle ne vous définit pas.
Et surtout : Il n’est jamais trop tard pour en parler, pour comprendre, pour s’apaiser.
Et si vous vous reconnaissez dans ces lignes…
Sachez que vous n’êtes pas seul.e. Ce trouble n’est pas une fatalité. Vous avez le droit de demander de l’aide, sans honte ni culpabilité.
Si vous ressentez le besoin d’en parler, je suis là pour vous écouter et vous accompagner avec bienveillance. N’hésitez pas à me contacter.
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